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Le jeu de la vétusté au regard de la réparation intégrale
? NÉLIA PALMAS | 14/11/2018 à 00h00
DOSSIER
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Le jeu de la vétusté au regard de la réparation intégrale
Nélia PalmasJuriste métier chez ANEA
« Le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l’équilibre détruit par le dommage, et de replacer la victime, aux dépens du responsable, dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit », comme l’a énoncé la Cour de cassation dans un arrêt de la deuxième chambre civile en date du 28 octobre 1954 (Civ. 2e, 24 oct. 1954, J.C.P. 1955, II, 8765).
Tout le préjudice, mais rien que le préjudice
En droit commun, un principe essentiel prévaut en matière de responsabilité civile : celui de la réparation intégrale. La règle est claire, tout comme la formule de la Cour de cassation ci-dessus : la victime doit être replacée dans la situation exacte qui était la sienne avant le sinistre, sans en subir un appauvrissement (Civ. 2e, 12 mai 2011, Bull. civ. II, n° 106) ou en tirer un enrichissement (Civ. 1re, 9 novembre 2004, Bull. civ. I, n° 264).
Seul le préjudice doit être réparé et ce, dans son intégralité comme le dit si bien l’adage « tout le préjudice, mais rien que le préjudice » (pour un exemple récent, Crim. 1er sept. 2015, n° 14-84.535 – en l’espèce, la Chambre criminelle a estimé que la demande en réparation formulée par la demanderesse, tendant au prononcé d’une mesure de remise en état des lieux, n’était pas nécessaire à la réparation du dommage qu’elle avait subi, la démolition du bien litigieux suffisant).
Ici, la gravité de la faute à l’origine du dommage, ou son caractère intentionnel, sont sans incidence sur la réparation due à la victime, l’indemnité réparatrice ne devant être calculée qu’en fonction de la valeur du dommage subi, ainsi que l’énonce la Cour de cassation : « l’indemnité nécessaire pour compenser le dommage subi doit être calculée en fonction de la valeur du dommage, sans que la gravité de la faute puisse avoir aucune influence sur le montant de ladite indemnité » (Civ. 2e, 8 mai 1964, JCP 1965. II. 14140, note Esmein).
Il est d’ailleurs utile de rappeler qu’en droit français, la victime n’a aucune obligation de minimiser son dommage dans l’intérêt du responsable, au contraire de ce qui est prévu dans le droit anglais depuis la fin du XIXe siècle – le duty to mitigate damages ou devoir de limiter les dommages. En France, malgré quelques tentatives, ce devoir de minimisation de son dommage par la victime n’a pas ou peu reçu les faveurs de la jurisprudence. En témoigne notamment la décision de la deuxième chambre civile du 26 mars 2015.
En l’espèce, un cuisinier avait été victime d’un accident de la circulation à la suite duquel il avait été déclaré inapte à la profession de cuisinier par le médecin du travail, puis licencié par son employeur après avoir refusé un reclassement à un emploi adapté à ses capacités intellectuelles et physiques restantes. La victime avait alors assigné le responsable de l’accident et son assureur en réparation de ses préjudices. La Cour d’appel avait réduit l’indemnisation due à la victime face à son refus d’occuper un emploi adapté à ses capacités. La Cour de cassation avait cassé cet arrêt en rappelant, qu’au regard du principe de réparation intégrale, « l’auteur d’un accident doit en réparer toutes les conséquences dommageables » et « que la victime n’est pas tenue de limiter son préjudice dans l’intérêt du responsable » (Civ. 2e, 26 mars 2015, n° 14-16.011).
Le principe de la réparation intégrale en matière automobile
En matière de sinistre automobile, le principe de la réparation intégrale ne peut pas être appliqué strictement. Il n’est en effet que très rarement possible de remettre la victime dans la situation exacte qui aurait été la sienne sans la survenance du dommage. Pour peu que le véhicule ait été détruit lors du sinistre, ou qu’il ait été extrêmement endommagé, il n’est matériellement pas possible de le « recréer » à l’identique et donc d’avoir une application au pied de la lettre du principe de la réparation intégrale.
En conséquence, ce principe a dû souffrir d’une adaptation pragmatique pour pouvoir être appliqué. Il commande donc, non plus que le véhicule soit remis dans son strict état antérieur, mais que la victime soit replacée « aussi exactement que possible dans la situation où elle se serait retrouvée si le dommage n’était pas survenu » (Vincent Heuzé, Conférence « Risques, assurances et responsabilités », Cour de cassation 2005).
Cela signifie que le principe de la réparation intégrale impose en matière automobile que la victime se voit octroyer le remboursement des frais de remise en état de son véhicule, voire la remise en état de son véhicule par le professionnel auteur du dommage, ou qu’elle perçoive le paiement d’une somme d’argent représentant la valeur de son remplacement (Civ. 2e, 13 janv. 1988, n° 86-16.046, RGAT 1989, p. 345, note Chapuisat F.).
Ces différentes expressions du principe sont rendues possibles par la structure même du marché automobile et la nature des sinistres pouvant affecter les véhicules. En effet, l’existence d’un marché du véhicule d’occasion rend réalisable l’estimation de la valeur de remplacement du véhicule et surtout, il permet à la victime de retrouver un véhicule dans un état similaire à celui sinistré.
Toutefois, bien que cette reformulation soit précise et clairement compréhensible, sa mise en application peut être plus malaisée. Que la réparation ait lieu en nature ou en équivalent, il se pose fréquemment en matière automobile la question fondamentale de la vétusté : au regard du principe de la réparation intégrale, est-il possible d’accepter l’application d’un coefficient de vétusté sur l’indemnisation du sinistre automobile ?
Vétusté or not vétusté ?
La vétusté est une dépréciation de la valeur du véhicule causée par l’usage ou le temps. En effet, en fonction de l’utilisation plus ou moins intensive qui est faite du véhicule ou de son âge plus ou moins ancien, un véhicule peut voir sa cote sur le marché baissée peu à peu et donc supporté une diminution de sa valeur.
Dès lors se pose la question, en cas de sinistre, de l’éventuelle application d’un coefficient de vétusté venant réduire la valeur de l’indemnisation afin de tenir compte de cette dépréciation et éviter un enrichissement sans cause de la victime.
Si l’application d’un coefficient de vétusté trouve tout son sens en matière d’assurances de dommages (lire « Vétusté et principe indemnitaire », par Sylvie Chanh, p. 11), le droit commun et les assurances de responsabilité ne réservent qu’un accueil très frileux, voire glacial à une telle réduction de l’indemnité. Cela, en raison du principe de réparation intégrale.
En effet, ici, la jurisprudence estime que la vétusté ne doit pas donner lieu à l’application d’un coefficient réducteur sur l’indemnité d’assurance, ce qui aurait pour effet de ne pas replacer la victime dans la situation exacte qui aurait été la sienne sans la survenance de l’événement dommageable (Civ. 3e, 19 juillet 1995, n° 93-16.106, Bull. civ. III, n° 191), ou qui la contraindrait à supporter injustement une dépense supplémentaire rendue nécessaire par la faute d’un tiers (Civ. 2e, 16 décembre 1970, n° 69-12.617).
« Mais attendu que le propre de la responsabilité est de rétablir aussi exactement que possible l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable n’avait pas eu lieu ;
Et attendu que l’arrêt énonce que, déduire des frais de la remise en état le coefficient de vétusté correspondant à l’âge du bâtiment ne replacerait pas la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit, puisqu’elle supporterait alors injustement une dépense supplémentaire rendue nécessaire par la faute du tiers ; »
En conséquence de quoi, la jurisprudence rejette le plus souvent l’application de tout coefficient de vétusté, estimant que le principe de la réparation intégrale implique que la victime soit en droit d’exiger la remise en état de son bien sans qu’il y ait lieu d’y appliquer une quelconque vétusté (Civ. 1re, 3 juill. 1990, n° 89-16.042 ; Civ. 2e, 8 juill. 1987, n° 85-14.052, RGAT 1989, p. 345, note Chapuisat F.).
Le refus de la jurisprudence d’accueillir l’application des coefficients de vétusté, que l’on se trouve ou non dans le domaine automobile, peut ainsi parfois conduire à ce que le montant de l’indemnisation soit supérieur à la valeur du bien avant le sinistre. En effet, la remise en état d’un véhicule sinistré peut conduire au remplacement de pièces usées, ou détériorées par la « vie » normale du véhicule, par des pièces neuves. C’est par exemple le cas lorsque la remise en état du véhicule implique le changement de pièces dites d’usures comme les pneumatiques ou les plaquettes de frein. Il est alors certain que la victime tire un profit de ce remplacement à neuf si aucune vétusté ou aucun abattement pour usure ne lui est appliqué.
Toutefois cette solution est parfaitement justifiée au regard de cette nécessité de replacer la victime dans une situation identique ou au moins similaire à celle qui aurait été la sienne sans la survenance du dommage, et de restaurer ainsi l’équilibre détruit par le sinistre. Il serait en effet inique de faire supporter à la victime, en plus de la perte ou de l’endommagement de son bien, une partie de la charge du sinistre (Civ. 2e, 9 mai 1972, n° 70-14.150, RDT civ. 1972, p. 690). En conséquence, la Haute cour a jusqu’à maintenant toujours confirmé son refus d’appliquer à la victime un coefficient de vétusté pour compenser l’avantage qu’elle tirerait d’une remise en état de son véhicule avec des pièces neuves (Ass. plén. 7 févr. 1986, n° 84-15.189, Bull. civ. ass. plén. n° 2, RGAT 1988, p. 341). Cependant, cette position de la jurisprudence pourrait connaître une évolution dans les années à venir.
Le développement du marché des pièces automobiles issues de l’économie circulaire et le mouvement du développement durable pourraient bien contribuer à faire infléchir la règle (lire « Vétusté automobile, la PIEC va me tuer ! », par Lionel Namin, p. 18). ?